PSYCHOLOGUE GUESLY MICHEL DONNE DE LA PSYCHOLOGIE

Guesly MICHEL, un nom qui sonne fort dans le domaine de la santé mentale en Haïti notamment dans le Nord. En effet, depuis plusieurs années, Psychologue Guesly MICHEL est à la tête d’une grande Institution dans le Nord dénommée SANT SANTE MANTAL MÒN PELE dont il est l’initiateur. Situé dans la commune de Quartier-Morin, l’espace de SANT SANTE MANTAL MÒN PELE rallie santé mentale, santé physique et recherches. Ce Centre est l’un des rares endroits dans le pays qui dessert la population en termes problèmes mentaux qui sont monnaie courante. Les résultats parlent d’eux-mêmes. Selon, les expériences des Spécialistes de la santé mentale de ce Centre, 80% des familles assimilent leurs problèmes mentaux à de la persécution, ou des sorts mystiques jettés sur elles. Ainsi, elles se dirigent plutôt naturellement soit vers un Pasteur, soit vers un Hougan afin de les aider à trouver des solutions qui n’arriveront peut-être jamais.

Auparavant, la population était privée des informations sur la santé mentale, l’accès à un Psychologue était snobé. Grâce aux efforts constants du Psychologue Guesly et de ses amis, on peut dire que les haïtiens, notamment les Capois sont de plus en plus avisés en terme de santé mentale. On peut dire que la population comprend mieux la dépression, les troubles bipolaires, les TSPT (Troubles du stress post-traumatiques), les maladies du travail, les dépressions post-partum etc… JEDIMANTAL! C’est aussi une co-initiative du Psychologue Guesly. Aujourd’hui, à travers cet entretien, il va nous parler non seulement du fonctionnement de SANT SANTE MANTAL MÒN PELE mais aussi élaborer un peu sur la situation de la santé mentale, du stress et de la dépression en Haïti.

1– Rachel: Bonjour Guesly, Comment allez-vous ?
Guesly: Bonjour Rachel, Je vais bien tout en accomplissant ma mission de vie.

2- Rachel: Pouvez-vous vous présenter aux lecteurs de la Plateforme HAPPINESS COMMUNICATION s’il vous plaît ?

Guesly: J´aime dire que je suis un humain avant tout. Je suis né à Cap-Haitien et j’y ai grandi. Pour arriver à comprendre les autres, j’ai fait des études de psychologie niveau Licence à la faculté des sciences humaines de Port-au-Prince, une spécialisation à Cuba qui me confère le titre de psychologue communautaire. J’ai aussi fait des études en ligne comme : Spécialisation en psychologie d’urgence en temps de crise. A côté de tout ça, j’ai également effectué des études en gestion des organisations culturelles. Depuis 6 ans je fais un mariage entre la santé mentale et la culture juste pour mieux comprendre les autres et les aider à vivre mieux. 

3- Rachel : Avant tout, dites-nous pourquoi vous avez fait choix de la Psychologie, une fillière des sciences humaines qui n’avait aucune importance pour la population à l’époque ?

Guesly : Mon intuition m´y a poussé et toutes les conditions se sont réunies pour que je sois un professionnel de la santé mentale aujourd’hui.

4- Rachel : Comment avez-vous pu mettre sur pied SANT MANTAL MON PELE ? Parlez-nous de sa mission et de son fonctionnement ?

Guesly : La création de SANT SANTE MANTAL MÒN PELE est venue de l´idée d´innover afin de résoudre le problème d´accès aux soins de santé mentale. J’entendais tous les jours parler de centre de santé, certes on ne mentionnait pas de centre de santé physique mais on y prenait en charge que l’aspect physique de l’être humain. Je me suis dit pourquoi ne pas mettre sur pied un centre de santé qui fixerait son attention sur la santé mentale sans toutefois négliger la santé physique. A partir de là, j’ai eu la possibilité de bénéficier d’un ancien dispensaire qui était à l’abandon depuis près de 15 ans. Comme il se trouve dans la localité de Morne Pelé je l’ai baptisé du même nom. Sa mission première est d’aider la population à prendre conscience de l’importance de la santé mentale pour leur santé globale que ce soit au niveau physique, sociale, économique, etc… « Pran swen lespri w w ap kontan wè kò w » c’est notre refrain.

Ensuite, notre deuxième mission, comme j’aime le dire c’est « donner de la psychologie» à toute la population mais surtout à ceux qui n’y avaient pas accès. Le centre fonctionne du lundi au samedi de 8 heures à 4 heures mais nous ne recevons pas de patients à partir de 2 heures dans le but de fournir des soins de qualité.

5- Rachel : Pouvez-vous établir pour nous la différence entre la psychologie et la santé mentale ?

Guesly : La psychologie est une branche de la santé mentale tandis que cette dernière est plus globale. Dans la santé mentale on trouve les sciences comme la psychologie, la psychiatrie, le travail social, la médecine,… Presque toutes les branches qui s’occupent de l’être humain font partie de la santé mentale. La psychologie, elle, prend en charge le comportement de l’individu en mettant l’accent sur l’âme, le mental de cet individu ; ce qui fait de la psychologie la science principale, la base de la santé mentale.

6- Rachel : Comment voyez-vous en général la situation de la santé mentale en Haïti ?

Guesly : Je vois la situation de la santé mentale en Haïti en trois grandes époques :
1) Avant 2010

2) De 2010 à 2015

3) De 2015 à aujourd’hui. 

Avant le tremblement de terre de 2010 c’était un petit groupe qui détenait le monopole. Par exemple, au Cap-Haïtien il n’y avait qu’un seul psychologue. A la faculté des sciences humaines, mes professeurs étaient peu nombreux et la plupart d’entre eux avaient étudié à l’étranger.

Avec le tremblement de terre de 2010, plus de gens ont pu constater l’importance de la santé mentale. Avec l’aide de certaines ONG il y avait sur place plusieurs psychologues disponibles et cela a duré environ cinq ans. A partir de 2015, on a assisté à l’émergence de plusieurs entreprises autonomes haïtiennes pour maintenir la santé mentale, l’association de psychologie en Haïti, d’autres organismes portant sur la santé mentale,
plus de cliniques de psychologues privés, jusqu’à la création du SANT SANTE MANTAL MÒN PELE en 2017. Il y avait aussi une structure au niveau de plateau central qui donnait des soins de santé mentale de très bonne qualité avec une approche
très semblable à celle de SANT SANTE MANTAL MON PELE. En Haïti, beaucoup d’efforts ont été faits car plus de gens vont voir sans contraintes un psychologue, ils sont beaucoup plus conscients de leur maladies mentales. Mais le travail ne s’arrête pas là car trop de gens croient encore que leurs problèmes mentaux sont plus d’ordre mystique, spirituel.

7- Rachel : Selon vos interventions quotidiennes, quels sont les problèmes les plus courants rencontrés dans la communauté ?

Guesly : Des problèmes d’anxiété, de dépression, quelques autres troubles comme : trouble bipolaire, schizophrénie, des problèmes d’apprentissage, des problèmes relationnels et aussi des problèmes liés au fonctionnement des gens mais qui relèvent aussi de la santé mentale.

8- Quels sont les plus grands défis auxquels SANT SANTE MANTAL MÒN PELE fait face depuis son début ?

Guesly : Je dirais que c’est surtout un problème de fonds car les gens n’ont pas toujours les moyens de payer les séances de thérapie. Sur le plan psychiatrique, on n’a pas toujours les médicaments qu’il faut et ils sont chers. Ceux-là misent à part, c’est plutôt l’intégration du centre au niveau étatique parce que jusqu’à présent l’Etat ne donne pas trop d’importance à la santé mentale. Déjà en 6 ans de fonctionnement on devrait être un modèle étudié, intégré au niveau national et ceci par les autorités étatiques. Ce qui n’est pas fait malgré les bons résultats donnés par le SANT SANTE MANTAL MON PELE.

9- Quelles sont les satisfactions avez-vous jouies aussi depuis votre genèse ?

Guesly : Comme satisfaction on peut dire on a contribué à aider les gens à faire moins de gaspillage de temps, d’énergie et d’argent car ils dépensaient n’importe comment pour des problèmes qu’ils pensaient être d’ordre mystiques. Notre satisfaction vient aussi du fait que les gens font une meilleure gestion de leurs problèmes grâce à une meilleure psychoéducation.

10- Rachel : Maintenant, parlons de la dépression ce tueur silencieux en Haïti. Pensez-vous que la population comprend bien ce phénomène ? Quels sont les réelles premières manifestations de la dépression ?

Guesly : Je ne peux pas dire que la population comprend bien la dépression. Certes, la population commence à en parler ouvertement mais parfois elle utilise le terme pour décrire d’autres symptômes qui n’ont rien à voir avec la dépression. En ce qui concerne les premières manifestations de la dépression, on observe une humeur triste, une baisse d’intérêt pour ce que vous faites habituellement (baisse d’intérêt pour la nourriture, le sommeil, le plaisir) perte ou prise de poids, la vie n’a plus aucun sens, cela peut mener à des idées suicidaires.

11- Rachel : D’après vous quelles sont les causes de la dépression ?

Guesly : Dans la majorité des cas le choc, les séparations, les situations difficiles, les grandes déceptions, les grosses pertes, les grosses inquiétudes) est la cause principale de la dépression, bien que certains chercheurs ont énoncé le fait qu’elle serait héréditaire ; mais les preuves leur font défauts.

12- Pensez-vous qu’il est possible de prévenir la dépression chez les jeunes en Haïti malgré les conjonctures socio-politiques ?

Guesly : On ne peut pas toujours éviter la dépression. Nul n’en est épargné, que ce soit les professionnels de santé mentale ou même les personnes dites fortes (il n’y a pas de personnes fortes, il y a juste des personnes avisées qui savent quand et où demander de l’aide). On peut par contre, les sensibiliser sur le sujet, leur indiquer les lieux d’aides et leur apprendre ce qu’il faut faire comme premiers soins psychologiques en cas de dépression.

13- Rachel : La Rédaction de HAPPINESS COMMUNICATION a appris que bon nombres d’haïtiens qui ont immigré aux Etats-Unis dans le Programme humanitaire Biden sont aussi frappés de dépression. Comment pouvez-vous expliquer cela ? Quelles suggestions donneriez-vous à ces personnes ?

Guesly : Peut-on vraiment dire que c’est l’immigration vers les Etats-Unis qui est la cause de leur dépression ? Il se pourrait que ce soient des personnes qui étaient déjà déprimées en Haïti qui ont voyagé avec leur dépression. Mais aussi, le fait de se séparer avec son pays, son travail, ses amis et même parfois sa famille peut causer une dépression. Les Etats-Unis comme nouveau pays, nouveaux moeurs et coutumes, …toutes ces nouveautés peuvent aussi être source de dépression chez les immigrés.

14- Rachel : Parlez-nous un peu de la technique de respiration ? Pensez-vous que les haïtiens savent respirer ? Quels conseils donneriez-vous à la population pour mieux respirer ?

Guesly : Vous faites peut-être allusion à la technique de respiration comme relaxation, comme thérapie. C’est plutôt simple. Je dis souvent lorsqu’on a l’impression qu’on perd le contrôle de tout, l’unique chose à faire est d’essayer de prendre le contrôle de sa respiration.

On inspire par le nez et on expire lentement par la bouche. Cette technique de respiration est vraiment la base de toute vraie bonne thérapie liée soit à la dépression, soit à l’anxiété ou juste à un stress trop élevé. Pour mieux respirer il faut prendre au minimum une à 3 minutes de temps en temps pour faire cet exercice.

15- Rachel : Quel serait votre dernier message au peuple haïtien, aux Spécialistes de la santé mentale comme vous ?

Guesly : Au peuple Haïtien, je dirais d´être plus conscient que chaque individu à un mental à soigner pour mieux vivre dans le plein sens du terme “VIVRE”. Aux spécialistes de la santé mentale, je les encouragerais à pratiquer un principe de la psychologie communautaire qui est de “donner la psychologie”. Je leur dirais de toujours trouver une raison pour « donner de la psychologie »